À l’intérieur d’une même nation, la pauvreté dans l’anarchie fait la misère, la pauvreté dans la discipline fait l’esprit de conquête, la richesse dans l’anarchie fait l’injustice, la richesse dans la discipline fait la puissance. Or la misère entraîne la révolte et la guerre civile. Celles-ci sont mères de l’esprit de conquête, lequel esprit fait la puissance. Bien vite, la puissance dégénère en injustice. Quant à l’injustice, qui pousse à concentrer progressivement dans quelques mains la richesse, elle ne tarde pas à créer la pauvreté du plus grand nombre dans l’anarchie. Dans le concert des nations, la disparité des situations crée un état de tension. Les nations à l’esprit de conquête causent des guerres. Les nations puissantes les gagnent. Les nations miséreuses subissent le joug des vainqueurs et les nations injustes deviennent miséreuses.

L’élite d’une nation miséreuse se roule dans le luxe. L’élite d’une nation à l’esprit de conquête est une élite soldatesque. L’élite d’une nation injuste est cultivée et raffinée. L’élite d’une nation puissante est commerçante et voleuse. Comme ce sont bien souvent les élites qui font les nations et leurs relations, on peut dire que les soldats font la guerre, les commerçants et les voleurs la gagnent, les débauchés deviennent les esclaves des commerçants et des voleurs et les raffinés deviennent des débauchés.

Il existe chez l’homme un besoin de richesse, un besoin de destruction, un besoin de culture, un besoin de discipline dans la richesse, la destruction et la culture. L’homme le plus complet et le plus abject est celui qui possède au plus haut degré ce dernier besoin. C’est le commerçant. Le débauché n’est qu’un commerçant sans discipline. Le soldat n’est qu’un débauché sans argent. L’homme cultivé n’est qu’un soldat sans armes.

À l’intérieur d’un même peuple, il se passe sans cesse une évolution qui ressemble, en plus petit, à celle du concert des nations. Le soldat crée l’agitation, le commerçant la brise, le débauché en pâtit, le raffiné devient un débauché.

Chez un homme, la pauvreté dans l’anarchie fait le raffinement et la culture, la pauvreté dans la discipline fait le soldat, la richesse dans l’anarchie fait le débauché, la richesse dans la discipline fait le commerçant.

On éviterait bien des débauches et des guerres, et on progresserait cependant bien vite dans la culture et le raffinement, s’il n’y avait pas de nations puissantes, d’élites commerçantes et voleuses et d’hommes complets et abjects. L’esprit de conquête s’émousserait, l’injustice disparaîtrait et la misère n’aurait plus la possibilité de se reconnaître. Supprimer la richesse dans la discipline ? Mais c’est le désir de toutes les nations, de toutes les élites et de tous les hommes !

Heureusement que Dieu nous a donné l’idée de la Beauté !