C’est un lieu où l’on vit pour rire,
Où l’on rit quelquefois, où quelquefois l’on pleure,
Un petit monde en réduction
Où les hommes, pourtant, sont plus grands qu’ailleurs,
Un miroir où se reflètent les gestes
Et les dits importants,
Mais qui ne renvoie point l’image
De l’impalpable temps ;
Un carrefour où se brassent les générations,
Un moulin à époques qui, délaissant la paille
Des illusions temporaires et contingentes,
Donne une poudre fine d’éléments essentiels,
Éternels et humains.
C’est la maison de l’Homme fait Dieu,
Assistant au spectacle de ses propres mouvements ;
C’est la joie, c’est le malheur,
Le bonheur et la vie,
C’est le désespoir et la mort ;
C’est tout en peu de choses,
Comme ces jouets d’enfant
Qui font un univers.

C’est un temple où l’on rit et pleure pour vivre,
Où l’on vit quelquefois,
Où quelquefois l’on meurt ;
Ce n’est pas un travail, c’est un sacerdoce,
Une sueur sans pain.
C’est une tradition d’amour,
Même quand parfois on simule la haine ;
C’est un couvent sacré où l’on vit pour prier,
Pour effacer les jours, pour effacer les peines,
Par des danses, et des chants, et des propos vivaces,
Sonores et pleins de chair ;
Une boîte à images, une statuaire animée,
Une fête rituelle.

C’est un plaisir sans mélange, une halte,
Un repos, un abri où l’on vient se mirer
Avant de poursuivre sa route.
C’est un moment qui donne souvent à penser,
Une carte pour les prochaines étapes,
Et pour le souvenir des étapes passées.
C’est l’Homme en raccourci, la vie en concentré,
Le mystère résumé.
C’est passionnant, c’est vrai, c’est beau,
Solennel et sacré.

C’est un programme, un vêtement de soirée,
Un lustre qui scintille, des ors et des rubis,
Du rouge cramoisi.
C’est un air guindé et ravi.

C’est un rideau qui se lève, c’est…
Chut !... le voilà qui paraît :
C’est le théâtre !